(sindre & marte) on joue, mais là j'ai trop joué.

On joue, mais là j'ai trop joué.

Les derniers mois avaient été compliqués, comme ceux à venir parce que Marte n'était plus qu'une épave. Le décès de Svante l'avait anéantie au point de ne plus vouloir rien ressentir, de n'être plus qu'une coquille vide, un corps sans âme, comme si sa vie à elle s'était envolée en même temps que celle de celui qu'elle aimait plus que tout au monde. Chaque jour ressemblait au précédent, une vie monotone, robotisée, dont le seul espoir était de se retrouver au soir enveloppé dans son plaid, au fond de son lit, ou avec une bouteille et l'envie d'oublier combien elle souffrait.

C'était début septembre, les étudiants avaient envahi le campus, et la ville en général. Marte, elle avait fini ses études, qu'elle avait rondement mené en même temps qu'un parcours professionnel salué par une médaille olympique, mais elle savait combien les soirées étaient parfaites pour son mal. Un tract posé sur sa voiture lui indiquait une fête en plein air aux abords de la forêt, de quoi se saouler et se plonger dans l'ivresse d'une nuit d'été. Elle enfila un jean, un top, des baskets qu'elle ne quittait qu'en de trop rares occasions, soignait son visage de crème et d'un maquillage léger histoire d'oublier ce teint blafard qui la caractérisait.

Lorsqu'elle arriva sur place, la fête battait déjà son plein, des filles rigolaient, des mecs déjà bourrés faisaient les malins près de la sono, d'autres dansaient au rythme de la musique. La brune s'approcha d'un bar dressé pour l'occasion, et se servit un cocktail qui s'avéra être plutôt très bien relevé. Elle soupçonna certains plaisantins d'avoir volontairement mis la dose sur la vodka. Peu importait, elle était là pour ça. S'enivrer, et oublier. Et puis elle l'aperçut, ce garçon, il avait l'air seul, et elle en était déjà à son troisième verre. "Salut toi." lui lança-t-elle en posant son bras autour de son cou. "Je m'appelle Marte, et toi je parie que t'es nouveau." Ce genre de mec se remarquait à Trondheim... Et lui, elle ne le connaissait pas, du moins, pas encore...

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On joue, mais là j'ai trop joué.

La musique noyait les paroles des fêtards en quête de sensations, mais qui avait besoin de parler alors qu’il suffisait d’une simple pression sur une épaule, d’un souffle dans le cou, d’une main sur ses hanches pour créer un dialogue se passant de mots. Il n’y avait rien de tel que deux corps qui se cherchent, qui se touchent, et l’alcool permettait justement de désinhiber les esprits timides pour laisser parler les sens. Ce mec-là, Marte l’avait trouvé charmant, mystérieux, un brin bad boy sur les bords, et c’est justement ce qui l’avait séduite. Il n’avait rien de son ex, absolument rien, et c’était exactement ce dont elle avait besoin. Il fallait qu’elle se prouve à elle-même qu'elle n’avait pas besoin d’Ørjan, que des garçons, il y en avait d’autres, et que chez lui, il ne lui manquait rien puisqu’elle se dirigeait vers un tout autre type. Le cerveau féminin était vraiment compliqué, sinueux, parfois même complètement renversant, encore plus imbibé d’alcool, mais ça semblait logique à cet instant précis. Marte, elle sentait bien qu’elle n’était pas dans son état normal, elle avait encore cette conscience d’elle-même, mais sans la pression qui allait avec.

Alors lorsqu’il posa sa main sur ses reins, qu’il l’attrapa pour la ramener vers lui, elle sentit son cœur palpiter à nouveau, pour une fois. Il rentrait dans son jeu, il avait aussi envie de se brûler les ailes, elle le voyait bien dans son regard. Ce mec dégageait une virilité dingue, et alors qu’il lui proposa un tour sur la piste, elle le dévora du regard. Son corps tout entier transpirait la testostérone, et ça lui plaisait bien. “J’ai bien cru que tu ne me le demanderais jamais, en piste cow-boy !” Elle se trémoussait déjà devant lui en l’entrainant par la main au milieu de la horde d’étudiants torchés. Ses mains glissèrent dans ses cheveux jusqu’à son cou auquel elle se tenait en faisant glisser son corps au rythme de la musique. Collée contre lui, elle serra un peu plus sa poitrine contre son torse, puis glissa ses mains dans son dos musclé afin de venir caresser ses pectoraux en s’éloignant de quelques centimètres. Elle l’observait, posait son regard brun dans les yeux clairs de son partenaire. Sans trop réfléchir, Marte s’approcha à quelques millimètres de ses lèvres, tournant autour, résistant encore tant qu’elle le pouvait à la tentation de ce baiser qui embraserait vraisemblablement son être tout entier.  

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On joue, mais là j'ai trop joué.

Des corps qui se balançaient au rythme de la musique, des langues qui s’entremêlaient, des rires qui résonnaient, des bouteilles qui se renversaient : une soirée étudiante dans toute sa splendeur. Marte s’était fondue dans la masse sans le moindre souci, ivre, dansant avec un inconnu au beau milieu des autres, des souvenirs qui lui échapperaient dès le réveil le lendemain matin. Le mec qu’elle avait repéré avait été particulièrement réceptif à ses avances, et voilà qu’il glissait ses mains sur son corps. Voilà maintenant des mois qu’on ne l’avait pas touchée Marte, qu’elle n’avait pas senti cette adrénaline grimper dans tout son corps, d’apprécier cette tension qui la liait à un garçon qu’elle ne connaissait que depuis quelques minutes. Si elle avait été sobre, elle aurait été gênée, elle se serait même probablement enfuie, paralysée par les souvenirs des mains d’Ørjan sur elle, par les flashs des moments passés avec ce garçon qu’elle avait tant aimé et après lequel elle n’avait jamais su redonner son cœur, ni même son corps. Marte, elle n’était le genre de filles à se donner au premier venu, et elle en avait assez d’être cette fille fermée, hermétique à toute approche depuis bien trop longtemps. Alors elle avait bu, trop bu... Et elle avait désinhibé ce mal-être tout entier pour enfin réussir à se laisser aller.  

Au milieu de la foule, Marte posa ses mains sur les fesses de son binôme, puis colla son corps contre le sien, avant de souffler dans le cou de ce bel Appolon, puis de venir attraper ses lèvres avec les siennes. Elle fit glisser ses mains le long de son dos avant de glisser ses doigts dans ses cheveux emmêlés pour mieux l’attraper. Elle oubliait qu’elle se tenait au milieu des autres, elle oubliait même ce qu’elle faisait ou encore qui elle était, elle oubliait que son cœur brisé ne serait jamais réparé, que son corps n’avait connu personne depuis Ørjan. Ce soir-là, elle allait changer tout ça, elle allait devenir une fille comme les autres, pour une fois, pour une soirée, pour une nuit. “On va chez toi ?” lui glissa-t-elle à l’oreille tandis qu’elle reprenait son souffle.  

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